Etudier au Maroc

Comprendre l’enseignement supérieur marocain

Au Maroc, les deux dernières années ont été consacrées au déploiement d’une réforme pédagogique visant à introduire une licence, un master et un doctorat nouvelle génération, avec un accent particulier sur les langues, soft skills et compétences digitales. Les cahiers de normes pédagogiques des établissements d’ingénieurs et de commerce à accès sélectif ont également été revisités dans le même sens. L’offre de formation est ainsi renforcée. Mais qu’est-ce qui caractérise l’enseignement supérieur marocain?

Ahlam NAZIH

                                                        

■ Un secteur public partagé entre 2 types d’établissements

L’enseignement public au Maroc compte deux types d’établissements. Les premiers sont dit «universitaires», rattachés aux 12 universités publiques que compte le pays. Il peut s’agir de facultés, d’écoles d’ingénieur, d’écoles de commerce ou d’instituts. Tous les établissements universitaires sont placés sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur.

Les deuxièmes sont dits de «formation des cadres». Ce sont des établissements ne relevant pas d’une université. Ils sont placés sous la tutelle de divers ministères (Agriculture, Industrie, Transport…). A l’origine, ils ont été créés pour répondre à des besoins précis et pointus en cadres et techniciens pour différents secteurs.

Les différences entre les deux types d’établissements sont minimes, et concernent notamment la gestion administrative et financière.

Tout le système public est totalement gratuit. Certaines écoles de la formation des cadres peuvent imposer des frais d’inscription, mais qui restent réduits. Parmi elles, une école au modèle unique, l’Ecole supérieure des industries du textile et de l’habillement (ESITH), avec une gestion public-privé, est payante. Cependant, son tarif reste largement accessible par rapport à la moyenne du marché.

                                                        

■ Des diplômes équivalents dans le privé

 Jusqu’en 2015, les établissements privés au Maroc ne pouvaient délivrer de diplômes équivalents à ceux du public. A partir de cette date, le ministère de l’Enseignement supérieur a ouvert les candidatures pour un label, «la reconnaissance de l’Etat». Les écoles et universités répondant aux critères imposés obtiennent ainsi la reconnaissance, et peuvent octroyer des diplômes équivalents. Ces derniers offrent notamment l’accès aux concours de la fonction publique et au cycle doctoral public.

La liste des établissements reconnus est publiée sur le site du ministère de l’Enseignement supérieur.

                                                        

■ … Et 2 accès: Ouvert et régulé

L’accès ouvert couvre l’ensemble des facultés publiques. Elles sont accessibles librement, sans aucune condition. Il en existe plusieurs types: sciences juridiques, économiques et sociales, lettres & sciences humaines, sciences, médecine & pharmacie, dentaire, polydisciplinaires, économie & gestion…).

Dans l’accès régulé, il faut passer par un filtre de sélection (concours écrit et/ou oral, sélection sur dossier…). Ce système comprend principalement les écoles de commerce et d’ingénieurs, ainsi que les facultés des sciences et techniques (FST).

Généralement, l’accès ouvert accueille plus de 85% des étudiants universitaires.

                                                        

■ 3 types d’établissements privés

Le secteur privé compte près de 207 établissements. Ils sont répartis entre deux grands segments: Le privé pur et dur (avec des écoles rattachées à des universités privées et d’autres non) et le privé en partenariat avec l’Etat. Dans ce deuxième sous segment, l’on retrouve des écoles et universités créées dans le cadre d’un partenariat avec l’Etat et recevant des subventions étatiques. Parmi elles, certaines universités se revendiquent d’un «3e secteur», car elles sont gérées par des fondations et sont à but non lucratif. L’ensemble de leurs bénéfices sont réinvestis pour améliorer la qualité de l’enseignement, promouvoir la recherche et offrir des bourses pour les étudiants méritants mais issus de milieux démunis. Dans ce modèle, l’on retrouve des universités comme l’UEMF, l’UM6P, l’UM6SS ou encore l’UIASS.

A côté de ces segments, une université au modèle unique au Maroc, «Al Akhawayn», qui est publique mais à gestion privée.

                                                        

■ 24 universités entre public et privé

                                                        

■ Des passerelles

Il existe des passerelles pour les meilleurs étudiants. Les lauréats des facultés des sciences peuvent par exemple, avec un bac+2, se réorienter vers la pharmacie ou vers une grande école d’ingénieurs.

Ceux des facultés des sciences juridiques, économies et sociales, de leur côté, peuvent intégrer une business school publique à accès sélectif (ISCAE, ENCG) après un bac+2.

                                                        

■ Un système de crédits

Depuis la rentrée 2023-2024, le Maroc a activé le système des crédits ECTS (European Credits Transfer System). Ce système permet une meilleure lisibilité du diplôme à l’international, facilite la mobilité des étudiants et leur ouvre plus de passerelles et de possibilités de réorientation. Les apprenants doivent comptabiliser 30 ECTS par semestre, pour un total de 180 pour l’ensemble du cycle licence (144 pour les modules disciplinaires et 36 pour les modules de langues et power skills).

                                                        

■ Des écoles de codage gratuites

Baptisées Code 212, des écoles de codage gratuites seront déployées dans toutes les universités publiques. Plusieurs ont déjà ouvert leurs portes, à Casablanca, Agadir, Kénitra…  A elle seule, Agadir en prévoit 9, avec une offre intégrée, incluant des espaces de coworking, de pitchs, de visioconférences…, et même de robotique, d’impression 3D et de réalité virtuelle.

L’idée de ces écoles est d’offrir aux étudiants, quel que soit leur background, la possibilité de souscrire à des certifications, afin de décrocher une double compétence, dans leur domaine d’études et dans le digital (coding, data science, robotique, intelligence artificielle, big data…). Cela permettra d’améliorer leur employabilité dans un monde qui se digitalise de plus en plus.

Ces espaces sont conçus à l’image des écoles 42 en France et des 1337 de la fondation OCP au Maroc. L’objectif est d’atteindre 100.000 certification (Microsoft, Huawei, Oracle, Cisco, Ericsson…) d’ici 2026.

                                                        

■ Du e-learning

Avec la crise Covid de 2020, le e-learning a fait son entrée dans l’enseignement supérieur marocain. Aujourd’hui, il figure officiellement dans le cahier des normes pédagogiques de la licence nouvelle génération, introduite en 2023-2024.

Tout enseignement peut ainsi s’effectuer en présentiel, à distance ou en mode hybride. Les universités sont encouragées à produire un maximum de ressources pédagogiques digitalisées, afin de permettre aux enseignants de consacrer plus de temps aux interactions avec leurs étudiants durant les séances de cours. Toutes les universités sont aujourd’hui dotées de studios d’enregistrement dernier cri.

Toutefois, le lancement de formations 100% en ligne n’est pas encore envisagé.

                                                        

■ Des écoles entièrement dédiées à l’IA

L’intelligence artificielle est aujourd’hui un must. Les filières et les modules dédiés à cette spécialité se multiplient au Maroc. Deux premières écoles d’ingénieurs publiques entièrement consacrées à l’IA et au digital ont vu le jour. Elles sont basées à Taroudant et Berkane. Relevant des universités d’Agadir et d’Oujda, elles ont démarré leur activité en 2023-2024.

L’Ecole nationale supérieur de l’IA et des sciences de données de Taroudant a ouvert ses portes pour une soixantaine d’étudiants des prépas, contre une centaine pour l’Ecole nationale de l’IA et du Digital de Berkane.

Les deux écoles comptent augmenter sensiblement le nombre de leurs effectifs et diversifier leur offre de formation à la prochaine rentrée. Celle de Berkane prévoit aussi de lancer des prépas intégrées, pour un accès en post-bac.

La création de ces écoles s’inscrit dans le cadre du programme de formation de 22.500 talents du digital par an à horizon 2027. Un programme qui a fait l’objet d’une convention de partenariat entre le ministère de l’Enseignement supérieur et les départements de la Transition numérique et des Finances.

                                                        

■ Des centres d’excellence dans les facultés

Pour améliorer l’attractivité des facultés à accès ouvert, le ministère a procédé à l’ouverture de centres d’excellence, «Tamayouz Centers», à l’intérieur même de ces établissements.

Ces centres, dotés de locaux et de ressources propres, sont accessibles à partir d’un bac+2, après une sélection axée sur le mérite. Les inscrits peuvent y enchainer avec un master, ou se réorienter vers d’autres cursus.

Ces nouveaux parcours d’excellence pourraient constituer à terme de nouveaux instituts et grandes écoles d’excellence spécialisés dans des domaines stratégiques: sciences politiques, droit, économie du développement, études stratégiques et diplomatiques, intelligence artificielle et data-sciences, informatique quantique, énergie et environnement, biotechnologie…

                                                        

■ Des certifications obligatoires en langues

Que ce soit en licence, master ou doctorat, les certifications en langues sont obligatoires.

  • En licence, les étudiants doivent justifier du niveau B1 en anglais (niveau seuil, selon le Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues, CECRL) et B2 dans leur langue d’enseignement (utilisateur indépendant ou avancé).
  • En master, c’est le niveau C1 en anglais (élevé) et C2 dans la langue d’enseignement (maîtrise ou expérimenté).
  • Au doctorat, il s’agit de réussir le DALF (Diplôme Approfondi de Langue Française) et le TOEIC (Test Of English for International Communication).

Des accès gratuits à des plateformes d’apprentissage des langues sont offerts.

                                                        

■ Une vie étudiante plus animée

Le ministère de l’Enseignement supérieur a décidé de placer les activités para-universitaires au cœur du modèle pédagogique des universités publiques. Ces dernières se sont, d’ailleurs, engagées par contrat (de la même manière qu’elles se sont engagées en matière de pédagogie et de gouvernance) à diversifier les évènements et programmes dans ce sens (compétitions sportives, hackathons, représentations artistiques…).

Une première manifestation, nationale, a été organisée en mars 2024: La 1ère édition de la Cérémonie Nationale des Chorales des Universités. Les clubs étudiants seront, également, encouragés.

Ces activités peuvent être converties en crédits ECTS, une mesure à même d’inciter les étudiants à y souscrire.

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