Comment le numérique a transformé les métiers du management
- Les étudiants ignorent souvent les nouveautés
- Des écoles revoient leurs contenus et opèrent une veille sur le marché
LE digital n’est pas qu’une affaire de développeurs ou de techniciens. Tous les métiers sont aujourd’hui concernés. Certaines professions se sont transformées grâce aux possibilités offertes par les nouvelles technologies, dont l’intelligence artificielle (IA), le cloud, les big data… Les managers en savent quelque chose.
«La mutation numérique a même généré de nouveaux métiers. Comme la reconnaissance semi-automatique des manuscrits, entraîneur de robots (ou chatbots), gestionnaire de la visibilité et de la réputation d’une organisation sur les réseaux sociaux, e-relations press pour influenceurs, website rewriter, cyber-documentaliste…, ou encore, digital learning manager: nouveau responsable veille de la formation, à l’ère des podcasts, Moocs (massive open online courses), etc.», relève Moulay Ahmed Lamrani, président de HEEC Marrakech. Les étudiants connaissent-ils ces nouvelles spécialités de plus en plus demandées sur le marché du travail? Pas vraiment, selon Lamrani. Les services d’orientation non plus.
Du côté des grandes business schools, la prise de conscience est bien installée, surtout que de nombreux métiers du management ont vu leur champ d’action évoluer ces dernières années. Elles sont donc tenues de réviser en permanence leur offre de formations. Certaines opèrent une veille sur le marché et révisent leurs programmes pour intégrer les nouveautés.
Les directeurs marketing et DRH tenus de se doter de nouvelles compétences
Chourouq Haisni, directrice des programmes et des accréditations à ESCA Ecole de Management, partage des exemples de postes transformés par le digital, dont celui de directeur marketing. «Il doit désormais maîtriser le marketing digital, l’analyse de données, le SEO/SEM (Search engine optimization/ search engine marketing), et les réseaux sociaux. Il collabore aussi avec des chief experience officers (CXO) pour gérer l’expérience client via les outils big data et IA», explique-t-elle. Les directeurs des ressources humaines aussi, au-delà des logiciels de gestion administrative, sont désormais dans l’obligation de se doter de nouvelles compétences, pour utiliser les plateformes de recrutement en ligne, les outils d’analyse RH, les systèmes de gestion de la performance… «Ils sont également tenus de maîtriser les nouvelles technologies afin d’améliorer l’attractivité et la rétention des talents, et pouvoir s’adapter aux nouveaux modes de travail hybride», complète Chourouq Haisni. Pour elle, la compétence digitale devient transversale. «Notre rôle en tant que business school est de former des managers disposant des atouts nécessaires pour accompagner la transformation digitale des entreprises», souligne-t-elle.
A l’ESCA, le digital est intégré à l’ensemble des programmes (growth hacking, blockchain, FinTech, SEO/SEM, management des SI, e-commerce, social media management, big data et AI…). S’ajoutent à cela des cours optionnels et des séminaires dédiés aux nouvelles technologies. Pour rapprocher les apprenants des outils digitaux, l’école privilégie un «apprentissage actif», à travers des hackathons, business games, simulations sur des logiciels métiers… L’expérience d’apprentissage est également digitalisée, à travers des infrastructures «avancées», telles qu’une salle des marchés connectée à plus de 200 bourses internationales, des équipements hyflex (pour un apprentissage hybride entre présentiel et distanciel) et des plateformes d’e-learning comme Coursera.
De nouvelles fonctions émergent
L’essentiel des métiers qui verront le jour dans les dix prochaines années ne sont même pas encore connus. «Le grand défi est donc de les découvrir en anticipant sur l’avenir», estime Moula Ahmed Lamrani. Ces dernières années, plusieurs ont émergé dans le management, grâce au digital. Parmi eux, celui de chief digital officer (CDO), qui pilote la stratégie numérique de l’entreprise. «Il y a également le data scientist, qui analyse les données pour appuyer la prise de décision, et le growth hacker, qui stimule la croissance par des techniques innovantes», illustre Chourouq Hsain.
Des modules obligatoires
«Les business schools devront revoir à la fois le contenu de leurs formations et leurs méthodes de travail, pour affronter les défis de demain», souligne Moulay Ahmed Lamrani. Il insiste également sur l’usage des technologies avancées dans l’enseignement, dont des simulations et outils d’apprentissage virtuels.
Le ministère de l’Enseignement supérieur a, pour sa part, imposé des modules obligatoires de digital skills dans les programmes de licence (et bientôt en master, à la rentrée). Les services du ministère se digitalisent aussi, avec des plateformes d’apprentissage en ligne, de gestion des parcours des étudiants (Massar Sup qui sera lancé en septembre prochain), de recrutement des enseignants, de gestion des bourses…
A.Na